Les Poèmes de la Lune Rouge (XXXIII)
Travail en cours. La numérotation du chapitre est provisoire
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Travail en cours. La numérotation du chapitre est provisoire
La Clôture est un ensemble de poèmes de Gorges Perec, numérotés de 1 à 17, qui a été publié une première fois en 1976, dans une édition limitée hors-commerce, avec des photographies de Christine Lipinska, et une seconde fois chez Hachette, en 1980, sous le titre de La Clôture et autres poèmes, sans les photographies, mais avec des poèmes supplémentaires d'origines diverses, parmi lesquels le Grand Palindrome (1969).
Ce recueil appartient au corpus des textes à contrainte hétérogrammatique de Georges Perec. Que sont des hétérogrammes? L'Oulipo, dans son Atlas de littérature potentielle, définit l'hétérogramme comme étant un "énoncé qui ne répète aucune de ses lettre". Dès lors, "des textes, généralement poétiques, hétérogrammatiques, sont des énoncés dont chaque segment (vers) est l’anagramme d’un hétérogramme-souche. On retrouve dans cette contrainte une structure proche de la musique sérielle, chaque lettre ne pouvant être utilisée que lorsque la série a été épuisée" (Oulipo, Atlas de littérature potentielle, Paris, Gallimard, coll. Idées, 1981, pp. 231-232).
L'ensemble de La Clôture se rapporte originellement à la rue Vilin, dans le quartier de Belleville, où Georges Perec naquit en 1936 et vécut avec ses parents lors de ses premières années, jusqu'en 1942. Les photographies de Christine Lipinska ont été prises à la rue Vilin, et chacune d'entre elles est "illustrée" par un des dix-sept poèmes hétérogrammatiques. Perec définit ces photographies comme étant "les traces de cette clôture" (dans l'appel à souscription de l'édition originale).
Mireille Ribière nous explique le principe de composition de La Clôture :
"L’hétérogramme-souche, en ce cas, se compose des onze lettres ESARTINULOC auxquelles vient s’ajouter un joker, à savoir une lettre qui varie d’un vers à l’autre et d’un poème à l’autre et qui est figurée par un § dans la matrice côtoyant le poème dans l’édition de 1976. Ainsi pour le premier texte, « Tels où m’incarne, ô rictus, / l’absent lourd à ciel trop nu, / si calme, / transi ou cloqué, / criant secours. / La fin trouble sciant maison : / lecture du clos, / art inscrit à l’enfoui clôturé. / Sang » :
TELSOU§INCAR ESARTINULOC + M
NEORICTUSLA§ ESARTINULOC + B
SENTLOUR§ACI ESARTINULOC + D
ELTRO§NUSICA ESARTINULOC + P
L§ETRANSIOUC ESARTINULOC + M
L0§UECRIANTS ESARTINULOC + Q
ECOURSLA§INT ESARTINULOC + F
ROU§LESCIANT ESARTINULOC + B
§AISONLECTUR ESARTINULOC + M
E§UCLOSARTIN ESARTINULOC + D
SCRITALEN§OU ESARTINULOC + F
ICLOTURESAN§ ESARTINULOC + G" (Ribière, 2015).
L'édition de Hachette, en 1980, supprime à la fois les photographies et les matrices des poèmes, ce qui, concomitamment, rend obscure la contrainte, et défait le lien qui rattache les poèmes à la rue Vilin. Pourquoi ce choix? Peut-être parce que pour Perec, la rue Vilin est une "clôture" (il la définit lui-même comme telle) dans laquelle sont encloses des souffrances d'enfance, liées à la guerre, à la mort de son père, à l'antisémitisme de Vichy, et qu'il ne souhaite plus, en 1980, se rattacher à ce passé douloureux, s'y référer, se le remémorer. Rappelons-nous ce vers d'Apollinaire, "Dans ce miroir je suis enclos vivant et vrai comme on imagine les anges et non comme sont les reflets" ("Cœur couronne et miroir", in Calligrammes, 1913), qui, a sa manière, traite aussi du problème des enclosures psychologiques, sentimentales ou affectives!
Par ailleurs, en cachant l'hétérogramme-souche, en nous livrant un poème hétérogrammatique privé de sa matrice de lecture, Perec entend faire œuvre de poésie "normale", détachée de toute trace de contrainte oulipienne! L'absence de la clé de lecture des poèmes permet au lecteur de les recevoir comme des poèmes, justement, et non comme des énigmes à déchiffrer!
La Clôture serait ainsi devenu un ensemble de poèmes de l'ouverture, du détachement, de la sortie, de l'espace, de l'envol vers le grand large qu'est "l'art", le dernier mot du recueil, suivi d'un point d'interrogation toutefois (ci-dessous)! Bref, une sorte d'oxymore!
Le Bonzo Dog (Doo Dah) Band est un groupe de jazz, music hall, rock, pop, grand amateur de sketchs humoristiques et parodiques, qui officia à Londres, essentiellement, entre 1966 et 1970, puis en 1972 pour un dernier tour de piste. Si le jazz, style "big band", des débuts laissa progressivement la place, au fil des départs et arrivées de musiciens, à un pop-rock plus charts friendly et plus psychédélique, l'humour fut toujours l'ingrédient principal de la musique de ces joyeux zigues!
On peut les voir, notamment, comme des sortes de grands frères des Monty Python, dont le Flying Circus était directement inspiré de l'émission Do Not Adjust Your Set des Bonzo! Et avec lesquels ils collaborèrent à l'occasion!
Le nom du groupe fait à la fois référence au chien Bonzo, personnage de bande dessinée anglais très populaire dans les années 1920, et à leur grand maître, le mouvement d'avant-garde Dada! On a connu pire, comme patronages!
Le Bonzo Dog Band se fit connaître d'un public plus large grâce à son premier album, Gorilla, paru en 1967 chez Liberty Records!
Je me concentrerai ici sur la première période post-Bonzo, soit les années 1970-1972, au cours desquelles les ex-membres du groupe, avant la reformation éphémère de 1972, furent étonnement productifs!