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Les poèmes de la Lune Rouge (XXIII)

Travail en cours. La numérotation du chapitre est provisoire.

XXIX
 

Jacob jeta quelques idées sur le papier carrelé du cahier, plus ou moins rédigées. Il commençait à écrire les articles qu'il avait promis de livrer à son pote Carpaccio, pour sa publication anti fake news, plus ou moins régulière, La Réaction intersectionnelle, une gazette que la gauche et les verts haïssaient, et qu'ils avaient plusieurs fois tenté d'abattre, sans succès, ce qui réjouissait notre journaliste novice!

Son premier papier devait parler de la pauvreté d'un point de vue intersectionnel de droite. Of course! Jacob salivait déjà! Il avait sous les yeux la feuille de chou gauchiste genevoise, Le Postier, qui titrait (31 mai) : "Genève. Le nouveau visage de la pauvreté. Plus de 2500 personnes ont fait la queue samedi pour obtenir un colis alimentaire. La crise du coronavirus a plongé de nombreuses familles dans la précarité."

Parfait! Jacob allait pouvoir se lâcher un brin! Assis à la table de la cuisine, une bière à côté de lui, il écrivit!

"Genève dégouline de bons sentiments! Colis du cœur par-ci, colis du cœur par-là. Assez! Marre de cette outrance bien-pensante! A lire la presse, on dirait un concours sportif, combien de "pauvres" en plus, cette semaine, mon cher? On a connu des aides sociales plus sobres. Un peu de décence et de respect, sans oublier un soupçon de réflexion et d'analyse!

"Cela ne signifie pas du tout que je dénigre ou méprise les pauvres. Au contraire, je les respecte, et, sachant ce que fut la pauvreté au Tessin encore dans les années 1960, par exemple, je serai toujours du côté du pauvre, jamais du côté du riche! Et je les apprécie et les honore certainement autant, sinon plus, que tout un chacun.

"En revanche, je ne crois pas que, pour être "social", il faille être "gentil", car cela rime souvent avec naïveté, hélas... Et il faut aussi admettre qu'il ne suffit pas d'être vêtu de l'habit du pauvre pour être pauvre... Sauf peut-être dans notre monde occidental décadent dans lequel le paraître a investi quasi tout le champ du réel.

"Certes, toujours plus de gens vont chercher des sacs alimentaires. Mais s'agit-il pour autant de "pauvres"?

"Non, bien sûr! Il s'agit de gens qui profitent de la bonne occase, tout simplement! Et ils ont bien raison! Toute distribution gratuite attire forcément du monde, et de plus en plus de monde si cette distribution continue semaine après semaine. Cela n’a strictement rien à voir avec la pauvreté, mais avec des gens « normaux », souvent des migrants, sans doute un peu "serrés", qui ont simplement flairé la bonne aubaine. Un sac de bouffe gratos, c’est toujours bon à prendre, n’est-ce pas ? Je concède que ce ne sont sûrement pas des Crésus, mais ce ne sont pas des Job non plus…

"Ces gens-là ne sont pas pauvres, de plus, car la plupart sont déjà assistés, ou sur le point de l'être. Mais Caritas, les Colis du cœur et tutti quanti nous les "vendent" comme tels, car ils constituent leur clientèle, leur raison de vivre, leur garantie de recevoir des subventions, qui sont le carburant de ces associations.

"De même, une pauvreté très largement mythifiée constitue l'un des terreaux de pensée de nos socialogauchoverdobobos, pauvreté que les immigrés ont parfaitement appris à surjouer, car ils savent très bien ce qu'on attend d'eux pour toucher les allocations et les nombreux avantages financiers qui sont la motivation première de leur venue ici.

"D'ailleurs, les socialistes, qui ont laissé tomber personnes âgées, retraités et travailleurs, ne parlent plus de pauvres, mais d'immigrés, comme si cela était synonyme. La bonne blague! Quant à leur fameuse (fumeuse?) "urgence sociale", c'est une vraie rigolade, dans un canton où les assistés sont bien plus nombreux que les chômeurs! Car, par définition, une fois que l'on est à l'assistance, il n'y a plus d'urgence.

"Vous voulez de la vraie pauvreté ? Alors, allez vous renseigner sur la vie dans les banlieues pauvres de Glasgow en 1969, ce n’est pas sur Mars, c’est bien le tiers-monde  chez nous en Europe! Là, ça craignait vraiment! Un reportage sur la star du rock Jack Bruce, originaire de Glasgow, le montre amplement, Bruce ayant voulu faire savoir d’où il venait (Rope Ladder To The Moon, reportage produit par Robert Stigwood, 1969). C’est de cette pauvreté que vient le rock ! Or, quelle musique viendrait-elle de notre "pauvreté" stipendiée, subventionnée et colisducoeurisée genevoise ? Aucune, car ce n’est pas une vraie pauvreté…

"A Genève, le vrai pauvre, le clochard, par exemple, ne sait tout bonnement pas que cette distribution de sacs a lieu, parce qu’il ne fréquente pas le web et n'a pas de natel, faute de moyens, eh oui, et de toute manière il s'en fout, il ne quitterait pas sa tanière pour autant. Il préfère y descendre ses binchs tranquillement.

"Aucune pauvreté n'est visible dans nos rues, cela est un signe évident! J'étais à New-York, dans la 42ème Ouest, en 1989, et c'était craignos, avec des fenêtres sans vitres et des lames pendant à la ceinture de zigues vous observant pour évaluer la taille de votre porte-monnaie, au point de vous ficher vraiment la trouille! Pas un endroit pour les chochottes de bobos genevois...

"L’empathie, c’est sympa, mais quand elle confine à la naïveté, voire à la bêtise, ou, pire, à la satisfaction de son égo ou à son autopromotion en tant que "personne aidante", donc "admirable", véritable perversion de la charité chrétienne dans un monde déchristianisé, il faut y mettre le holà !"

Jacob relut sa prose. Il trouva cela pas mal, quoique trop long. Espèce d'immodeste, se dit-il! Carpaccio lui demanderait certainement de raccourcir, mais peu importait! Il continua d'écrire! Sa plume volait!

"Selon les principes de la novlangue orwellienne, à savoir la réduction lexicale, le glissement sémantique, la suppression des nuances qui mène à la dichotomie manichéenne, le double sens et enfin le renversement sémantique, le pauvre qu'on nous présente ici est en fait le riche, comparé au travailleur précaire, souvent déjà renvoyé dans son pays, et au clochard non subventionnés ni colisducoeurisés, qui sont les pauvres réels de notre société, sans que personne ne s'intéresse réellement à eux car ils ne "rapportent" pas. Le "pauvre" de ces défilés de "haute pauvreté" du samedi matin aux Vernets est le riche assisté, généralement immigré illégal, à qui tout est donné, et encore plus, car il permet à l'occidental gauchobobo de se disculper de l'esclavage et de la colonisation, et de faire sa propre pub à moindre frais...

"C'est pourquoi, à ceux qui objecteront que tout cela n'est au fond qu'une question de vocabulaire, et que le vocabulaire importe peu, je répondrai que non, au contraire, le vocabulaire importe, car il n'est pas anodin, il est fondamental, il est même essentiel en ce qu'il formate la pensée! Le totalitarisme, y compris celui qui se met peu à peu en place dans nos (soi-disant) démocraties (de moins en moins) libérales (dans le sens politique du terme, parce que pour ce qui est du sens économique, elles le sont à donf!), l'a fort bien compris!

"Dès lors, ces gens sont tout ce que vous voulez, et ils méritent absolument leurs sacs de bouffe, comme Sam Gabegie qui, tout en n'étant "pas fou de la boustifaille étrangère", reconnaît que "ce truc elfique", le lembas, "c'est pas mal"! Mais, de grâce, ne venez pas me dire que ce sont des pauvres!"

Il s'arrêta d'écrire. Il leva la tête du cahier et regarda par la fenêtre. L'automne était bien là, les feuilles rouges et jaunes changeaient les arbres en sapins de Noël! Et Noël arriverait bientôt, il s'en réjouissait, tout comme de la présence de Oona, qui était maintenant dans son dos, penchée sur lui, ses bras entourant son cou! Elle lisait par-dessus l'épaule de Jacob, le félicitait, et l'encourageait. Ils avaient à peu près les mêmes idées, et c'est elle qui lui avait fait rencontrer Carpaccio, un vieux client du bistro!

Carpaccio était un "cas", pensait Jacob! Un fils d'immigrés italiens plus suisse qu'un Suisse! Il se définissait comme un nationaliste ouvert, ni raciste ni xénophobe, un patriote qui voulait favoriser les siens, et non l'immigration, un autonomiste, un souverainiste partisan de la tradition, un ennemi du communisme, de l'internationalisme, du communautarisme, du mondialisme et du verdosocialogauchoboboïsme! Carpaccio, qui aimait rire, ajoutait volontiers à la liste le sabotisme, le birkenstockisme, le sandalisme, le vareusisme et le pullenlainisme!

Sacré programme! Mais, si Oona et Jacob adhéraient aux idées, ils avaient toujours refusé d'adhérer au mouvement "apolitique et neutre" de Carpaccio, Préférence Nationale (PN).

Jacob pris son cahier, se leva et se dirigea vers l'ordinateur, afin de faire des coupes et mettre en forme tout cela! Oona sortit faire des courses, notamment quelques emplettes de littérature à la Disparition, sa librairie préférée, et prendre le thé avec ses copines.

Jacques Davier (Octobre 2020)

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