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Corona Blog (V)

Une fois n'est pas coutume, j'ai décidé de consacrer entièrement ce cinquième billet de ma série "du confinement" à la présentation d'un livre excellent, qui m'a impressionné, et marqué. Je l'ai déjà lu deux fois, et il y a encore mille choses à y découvrir! Il s'agit de La Maison des Feuilles, de Mark Z. Danielewski.

« Et l’interminable couloir qu’il parcourt ne cesse de changer de dimensions. »

Connaissez-vous The House Of Leaves, de l’auteur américain Mark Z. Danielewski ? Ce « roman », publié en 2000, fut traduit en français, et parut aux éditions Denoël en 2002, dans la collection « Denoël et d’ailleurs ». Le Seuil en publia une édition « de poche » dans la collection « Points » en 2013. C’est l’ouvrage  que j’ai lu. J’ai dû m’accrocher, mais j’ai été plus que payé en retour !

Ce livre de 717 pages, avec annexes et index, se conclut par le petit poème suivant :

« O Yggdrasil / Quel est ce miracle ? Cet arbre gigantesque. / Il mesure plus de mille pieds de haut / Mais ne touche pas la terre. Cependant il se dresse. / Ses racines doivent porter le ciel. / O

Premier niveau de lecture. L’ouvrage commence avec, en introduction, le récit de Johnny Errand, jeune homme apparemment sans emploi vivant à Los Angeles. Johnny est appelé un jour par un copain, qui lui demande de venir explorer avec lui l’appartement d’un de ses voisins décédés, avant que les déménageurs ne viennent le vider. Il avait quelque chose de particulier à lui montrer. Un manuscrit. Apparemment écrit par l’homme décédé, un homme déjà âgé, nommé Zampanò (allusion à La Strada, de Fellini?). En partant, Johnny prit le manuscrit avec lui.

Deuxième niveau de lecture. Johnny se mit à lire ce manuscrit, structuré en chapitres, mais composé aussi d’un fouillis de feuilles et d’annotations diverses. Pris de passion, ou peut-être ayant été ensorcelé, comme il finit par croire que Zampanò l’avait été, il ne quitta plus le manuscrit des yeux, finissant par s’enfermer chez lui. Il se sentit chargé d’une mission, à savoir éditer et publier ces pages. Cela donnera The Navidson Record. C’est le livre que nous tenons dans nos mains.

Troisième niveau. The Navidson Record se présente comme une étude très pointue, un vrai travail d’érudition, d’une vidéo amateur. Ou plutôt de deux homes movies, tournés par Will Navidson, un cinéaste reporter professionnel, lors de l’installation de sa famille dans leur nouvelle maison d’Ash Tree Lane, en Virginie. Ce film, dont on ne sait pas s’il a réellement existé ou non, est bien sûr abondamment décrit dans le texte de Zampanò.

Le film commence par montrer la petite famille, les parents et leurs deux enfants en bas âge, prenant possession de leur nouvelle demeure, une imposante maison datant de l’époque coloniale. C’est alors que tout va basculer. A un moment donné, en filmant l’intérieur de la maison, Navidson découvre une pièce qui n’existait pas lorsqu’ils ont emménagé, deux mois plus tôt ! Puis, à l’encontre de toute prudence, Navidson décide d’aller explorer cette pièce. Il constate qu’elle donne sur un immense hall, qui ne peut pas exister selon nos lois de la physique, car il serait plus grand que la maison elle-même ! Puis, il convoque son frère et des amis pour monter une petite équipe d’exploration, très bien équipée avec du matériel de pointe.

Le explorateurs découvriront des escaliers et des couloirs interminables, qui s’allongent, se raccourcissent, s’élargissent ou rétrécissent au fur et à mesure de leur progression, des pièces qui apparaissent et disparaissent, et, surtout, un froid omniprésent. Tout cela les mènera jusqu’à la folie… Notre folie? L’exploration d’un de ces couloirs, à vélo, et en roulant vite, prendra plus d’une semaine ! Je ne dévoilerai bien sûr pas tout de ce livre passionnant, qui se lit lentement, page par page, car il est truffé d’annotations et de digressions ! Qui est, au fond, touffu comme un arbre !

Un autre intérêt de ce livre, c’est qu’il comporte un grand nombre de poèmes. En voici un :

« Tu seras mes racines

Tu seras mes racines et
je serai ton ombre,
même si le soleil brûle mes feuilles.

Tu étancheras ma soif et
je nourrirai tes fruits,
même si le temps emporte mes graines.

Et quand je serai perdu et ne pourrai plus voir cette terre
tu me rendras l’espoir.

                                 Et ma voix tu l’entendras toujours,
                                 Et ma main tu la tiendras toujours.

Car je t’abriterai.
Et je te consolerai.
Et même quand nous ne serons plus rien,
même dans la mort,
je me souviendrai de toi » (Mark Z. Danielewski)

Ce poème, au fond, ne détonne pas, il me semble, en période pascale! Bonne lecture !

Et, Danielewski étant assez déjanté dans son genre, je proposerai pour la route des musiques tout aussi déjantées! D'abord, Mea Culpa, par David Byrne et Brian Eno (My Life In The Bush Of Ghosts, 1981), ensuite Crosseyed and Painless, par les Talking Heads, le groupe de Byrne (Remain In Light, 1980), puis  Drugs et Memories Can't Wait, toujours par les Talking Heads (Fear Of Music, 1979), et enfin Under Heavy Manners, de Robert Fripp avec la participation de David Byrne (God Save The Queen/Under Heavy Manners, 1980)!

Suite au prochain épisode.

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